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Vaccination : retour sur trois siècles d’immunisation

La vaccination aura été l'axe essentiel de la lutte contre l'épidémie de Covid. 

Au 18 avril 2022, plus de 80% des français (54,3 millions de personnes) avaient reçu au moins une injection et 59% au moins une dose de rappel. Et ce sont 94,3% des plus de 65 ans qui étaient vaccinés contre le virus du Covid (source : Santé publique France).

À Marseille, depuis début 2021, six centres de vaccinations au total ont été proposés, à l'initiative de la Ville de Marseille et de ses partenaires et ont réalisé depuis, plus de 700 000 injections (chiffres au 4 mars 2022).

Même si elle suscite parfois des controverses, la vaccination a permis, depuis environ trois siècles, d'éradiquer ou d'endiguer de nombreuses maladies infectieuses.

En France, Louis Pasteur, fait figure de pionnier avec son vaccin contre la rage mis au point en 1985. D'autres éminents scientifiques et immunologistes lui emboiteront le pas pour trouver la parade vaccinale aux ravages d'autres maladies. Revenons sur leur combat pour repousser l'espérance de vie face aux principaux fléaux infectieux qui ont jalloné notre histoire.
 

 

Retour sur trois siècles d’immunisation active
 

Louis Pasteur n’était pas vraiment le père de la vaccination  

Certes, Louis Pasteur (1822-1895), le célèbre scientifique français chimiste, physicien de formation et pionnier de la microbiologie, reste dans l’imaginaire collectif, le père de la vaccination avec la mise au point d’un vaccin contre la rage. Mais il faut remonter en 1796 pour trouver trace du tout premier vaccin de l’histoire. C’est à Edward Jenner, modeste médecin de campagne anglais que l’on doit cette découverte révolutionnaire. Il remarque que les fermières d’un village ne contractent pas la variole, pourtant très répandue à l’époque mais sont toutes atteintes de la « vaccine », une maladie transmise par les vaches proche du virus de la variole, bénigne pour l’homme. Il inocule alors à un jeune garçon du village voisin un échantillon de la vaccine. La « variolisation » fait ses preuves : le garçon est immunisé. Edward Jenner sera surnommé le père de l’immunologie. Son vaccin aura sauvé des millions de vie mais il faudra attendre 1980 pour voir la variole s’éteindre définitivement. 
 

Pasteur et la rage

Moins d'un siècle plus tard, Louis Pasteur va reprendre les travaux initiés par Edward Jenner.
En 1879, à la faveur d’une expérimentation sur des poules infectées par le choléra, le chercheur français découvre qu’en atténuant la virulence du virus injecté, il devient moins dangereux, mais surtout il immunise le sujet receveur. 
En 1885, il met au point un vaccin contre la rage, maladie alors mortelle dans 100 % des cas dès les premiers symptômes, à partir d'une souche atténuée du virus. 
Le 4 juillet 1885, en Alsace, la mésaventure de Joseph Meister, 9 ans, va changer le cours de l’histoire de la vaccination. Alors qu’il se rend à l’école, le jeune garçon est attaqué par un chien enragé qui le mord à 14 reprises. Condamnée à voir mourir son fils, la mère de Joseph, qui a entendu parler des recherches de Louis Pasteur, se rend à Paris pour demander au scientifique de tester le vaccin sur son enfant. La première injection est réalisée avec succès sur Joseph Meister. Le désespoir et la persévérance de cette mère ont permis la découverte du vaccin contre la rage.
Fort de cette découverte, Louis Pasteur devient le spécialiste de « la vaccination », dénomination choisie en hommage aux travaux de Jenner. 
En 1888, l'Institut Pasteur a été construit grâce aux fonds collectés par la souscription nationale lancée le 1er mars 1886 par l'Académie des sciences pour la « création d'un établissement pour le traitement de la rage après morsure ».
En 1918, Joseph Meister devient le « Gardien » symbolique de l’Institut Pasteur.


En 1902, le vaccin contre la variole devient obligatoire en France

La variole, appellée aussi la petite vérole, aura été, avec la peste et le choléra, l’une des maladies les plus meurtrières de l’histoire. Elle fera des ravages dans la capitale, notamment entre 1869 et 1870, tuant en quelques mois plus de 4 200 Parisiens. 
En 1902, grâce aux travaux de l’Institut Pasteur, le Gouvernement français rend le vaccin contre la variole obligatoire. Une première en France car les Britanniques l’avaient rendu obligatoire en 1853 grâce aux travaux du docteur Edward Jenner sur le virus de la vaccine (1796). 

Malgré ces avancées, il faudra attendre 1980 pour que l’OMS déclare officiellement le virus de la variole éradiqué de la surface du globe ayant fait, selon les estimations, quelque 300 millions de victimes au XXe siècle. 
Ailleurs dans le monde, l’idée d’exposer un organisme à une version atténuée d’un virus pour lui apprendre à y résister avait déjà fait son chemin. Début du XVIIIe siècle, Lady Mary Wortley Montagu vit à Constantinople. Femme de lettres, turcophone, elle raconte – dans ses "Lettres turques" – le quotidien de l’Empire ottoman, et notamment comment les enfants sont protégés de la variole par inoculation, dès leur plus jeune âge, d’une forme bégnine de la variole les immunisant ainsi à l’âge adulte. L'écrivaine écrit alors en 1717 une phrase qui a pu surprendre au moment où la maladie faisait rage : "La variole, ce n'est rien." 

En 2017, la journaliste Lise Barnéoud propose – dans son livre "Immunisés ?" – un nouveau regard sur les vaccins (Ed. Premier Parallèle)  de remonter à 1695 pour trouver les premières traces de cette variolisation, en Chine, où les enfants bien portants étaient déjà vêtus d’habits portés par des malades de la variole. 

 

Le BCG de Calmette et Guérin

Développé à partir du début des années 1900, les docteurs Albert Calmette (1863- 1933), bactériologiste français, et Camille Guérin (1872-1961), vétérinaire français, mettent au point le vaccin Bilié,  préventif contre la tuberculose. Connu sous le nom de BCG, il est alors destiné aux bovins particulièrement exposés à cette maladie très contagieuse. 
Le 18 juillet 1921, il est inoculé pour la toute première fois à l’humain à l’hôpital de la Charité, à Paris. C’est un nouveau-né, dont la mère, morte en couche, et la grand-mère ont contracté la maladie, qui recevra la première injection.
Entre 1922 et 1926, sur 317 nouveau-nés vaccinés à la Charité, au cours des 10 premiers jours de leur vie, un seul succombera à la tuberculose. 

 

La diphtérie et le tétanos font avancer la médecine

En 1888, les Français Émile Roux et Alexandre Yersin montrent que la bactérie, responsable de la diphtérie, sécrète une toxine responsable des symptômes de la maladie. Deux ans plus tard, un médecin danois montre qu’il en est de même pour la bactérie responsable du tétanos. Les expériences sur des animaux cobayes montrent que l’injection de toxine diphtérique ou tétanique partiellement inactivée les protège contre une inoculation du bacille. De plus, leur sang contient des anticorps. 
En 1894, des essais cliniques entrepris par Behring et Roux montrent que le taux de survie des enfants atteints de diphtérie et traités par injection de sérum d’animaux immunisés est de 75%. Des améliorations apportées au traitement ont permis d’atteindre 90% de survie. 

 

Et aussi…

Dans les années 1930, l’américain Jonas Salk met au point le premier vaccin contre la grippe grâce à des virus atténués cultivés sur un liquide purifié issu d’œuf de poule. Dans les années 1950-1960 se développent également les vaccins à plusieurs valences, notamment le vaccin trivalent diphtérie-tétanos-poliomyélite (DTP) et le vaccin trivalent rougeole-oreillons-rubéole (ROR).
En 2006 est mis sur le marché des États-Unis et de l’Europe un vaccin contre les infections à Papillomavirus humains (HPV), un virus responsable de la survenue de cancers du col de l’utérus.

En janvier 2021, à travers le monde, on dénombre 1,9 million de personnes décédées à cause du coronavirus (COVID-19), dont plus de 70 000 morts en France (chiffres au 18 janvier 2021), selon les bilans quotidiens de Santé publique France et du ministère de la Santé. La vaccination des Français a démarré le 27 décembre 2020. Elle reste l’un des moyens efficaces pour lutter contre les ravages de ce nouveau fléau sanitaire. En attendant : portons le masque, lavons-nous les mains et respectons la distance d’un mètre avec chaque personne.

 

Image : tableau "Inoculation" par Léopold Boilly (1807)