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Il était une fois une sardine qui aurait bouché le port de Marseille…

 

Qui n'a pas déjà entendu parler de cette célèbre anecdote ? Reflète-t-elle le sens de l’exagération que l’on attribue volontiers aux Marseillais ?
Galéjade, folklore, humour venu tout droit du Vieux-port, on décrypte pour vous une histoire fleurant bon la mythologie provençale qui a laissé son empreinte dans la mémoire collective.

 

Vrai ou faux ?

C’est là toute la question ! « C’est la sardine qui a bouché le port de Marseille » est une expression populaire française qui remonterait au XVIIIe siècle. 
Cela signifie qu’une anecdote ou un récit est perçu et jugé comme une véritable exagération, une fable. En fait, cette expression est basée sur une anecdote historique marseillaise bien réelle.

 

Le contexte historique

Tout prend sa source dans le contexte de la guerre navale franco-britannique de 1778-1783. À l’époque, la France est sous le règne de Louis XVI et la guerre d'indépendance des États-Unis a commencé.

Le royaume de France — malgré sa délicate situation financière — cherche à récupérer de l'influence et des territoires cédés à la Grande-Bretagne lors du traité de Paris de 1763. 

La guerre d'Amérique débute en 1775, la France entre officiellement en guerre en 1778 et pèsera de façon décisive dans la victoire des insurgés américains et la reconnaissance de l'indépendance des États-Unis (par le traité de Paris de 1783)…

 

De Sartine à sardine

En 1779, des prisonniers français capturés dans la province de Pondichéry en Inde, alors à la merci des Anglais, sont libérés et embarqués sur un navire affrété spécialement pour l'échange de prisonniers, bénéficiant d'un statut protégé selon les lois de la guerre de l'époque. 

Ce navire se nomme le Sartine avec un « t » et non un « d », en référence au secrétaire d’État de la Marine sous Louis XVI, Antoine de Sartine (1729-1801). 

Après dix mois de navigation, le navire atteint le détroit de Gibraltar, en route vers  Marseille. À cette époque, les Anglais maîtrisent la Méditerranée et torpillent les bateaux ennemis. C’est pourquoi le Sartine battait pavillon anglais afin de naviguer sans encombre.

 

Le naufrage

Mais le 19 mai 1780, un navire britannique le HMS (*) Romney intercepte le Sartine par erreur et ouvre le feu. Le capitaine et deux hommes d’équipage sont tués. Après plusieurs tentatives d’explication, le navire britannique laisse finalement repartir le Sartine en direction de Marseille, mais sans capitaine à bord…

À l'entrée du port, une erreur de navigation précipite le Sartine sur des rochers et le navire finit par couler dans le chenal de l'entrée du Vieux-Port de Marseille, ce qui en empêche pendant un temps, l'accès et la sortie à tout autre navire.

D'après les mémoires du vicomte de Barras, c'est Georges-René Pléville Le Pelley, gouverneur du port et de la marine de Marseille, qui prendra en charge le treuillage du malheureux navire pour dégager le port...

D’après cette anecdote historique douloureuse, les Marseillais ont élaboré une expression nettement adoucie et résolument optimiste. Un bel exemple de résilience !
 

 (*) Les initiales HMS placées devant le nom donné aux navires de guerre britanniques, signifient « His Majesty’s Ship » ou « Her » si c’est une reine, en français « le navire de Sa Majesté ».