Culture Culture

La Marseillaise : 230 ans d’histoire

Si notre hymne national porte le nom de notre ville, ce n’est pas par hasard. Notre hymne national porte le nom de notre ville et il résonne à l’occasion des cérémonies officielles. À l’occasion de la fête du 14 juillet et surtout des 230 ans de sa création nous vous proposons de revenir sur ce chant que nous connaissons tous… ou croyons connaître !
 

La genèse

Le 20 avril 1792, la France révolutionnaire déclare la guerre au roi de Bohême et de Hongrie. Au cours d’un dîner qu’il donne chez lui en l’honneur des soldats de la garnison, le maire de Strasbourg, Philippe-Frédéric de Dietrich, charge le jeune Claude Joseph Rouget de Lisle d’écrire un chant de guerre pour galvaniser les troupes. Capitaine de Génie sous la Révolution, né en 1760 à Lons-le-Saunier, le poète ne sait pas, cette nuit du 25 au 26 avril, qu’il est en train d’écrire ce qui deviendra bientôt l’hymne national de son pays. Le lendemain, Dietrich est le premier à chanter le chant de guerre pour l’armée du Rhin, accompagné de sa femme au piano. L’hymne est d’abord diffusé en Alsace sous forme manuscrite ou imprimée, avant d’être repris par des éditeurs parisiens.

C’est alors un chant de guerre révolutionnaire, une marche pour la liberté, un appel patriotique à la mobilisation générale et une exhortation au combat contre l'invasion des monarchies européennes coalisées. 

En juin 1792, le jeune François Mireur, membre du club des Jacobins de Montpellier, se rend à Marseille pour organiser la marche conjointe des volontaires du Midi. Alors qu’une réception est organisée en son honneur dans ce bâtiment qui est devenu le Mémorial de la Marseillaise, il entonne à table ce chant patriotique ; l’effet est tel que les Jacobins marseillais l’enjoignent de le publier, dès le lendemain. Il deviendra alors le Chant de guerre des armées aux frontières.

En juillet 1792, l’Assemblée française déclare la patrie en danger, et appelle tous les volontaires nationaux à monter à Paris pour renforcer le peuple en armes. Des feuillets du chant de guerre sont distribués aux fédérés marseillais qui l’entonnent en chœur durant la longue marche qui les mène à Paris. C’est sur cette mélodie que les bataillons du midi tentent de pénétrer dans le jardin des Tuileries, et qu’ils affrontent les gardes nationaux. Sur cette mélodie qu’ils se déploient, avec leurs homologues bretons, sur le carrousel, et tournent ses canons vers le palais des Tuileries, où siège le roi. Comme une rumeur, cette chanson s’est alors répandue dans les rangs des volontaires, et est déjà devenue dans le cœur de tous les révolutionnaires La Marseillaise.

Elle est finalement déclarée chant national le 14 juillet 1795 (26 messidor an III dans le calendrier révolutionnaire) par la Convention, à l'initiative du Comité de salut public. Concurrencée sous l’Empire par le Chant du départ, puis abandonnée pendant la Restauration, elle est reprise en 1830 pendant la révolution des Trois Glorieuses qui porte Louis-Philippe au pouvoir. Berlioz en élabore une orchestration qu’il dédie à Rouget de Lisle. Mais Louis-Philippe impose La Parisienne, chant plus modéré. La Marseillaise est de nouveau interdite dans les lieux publics sous le second Empire.

La IIIe République en fait l'hymne national le 14 février 1879 et, en 1887, une version officielle est adoptée en prévision de la célébration du centenaire de la Révolution.

Contrôlée pendant l’Occupation allemande, il faut attendre la fin de la guerre pour que le chant redevienne officiellement l’hymne national (article 2 de la Constitution du 27 octobre 1946 par la IVe République). En 1958, l’article 2 de la Constitution de la Cinquième République française réaffirme ce vœu.

La Marseillaise est partie de notre ville pour devenir le chant de tous les Français. Elle est de ces chants que l’on s’approprie, qui portent en eux l’histoire de notre République. Comme tous les hymnes, elle est vivante, parfois critiquée, remise en question. Elle est un symbole universel de la lutte pour la liberté, contre la tyrannie et l’oppression, et continue d’inspirer les œuvres contemporaines : c’est elle qui ouvre la chanson des Beatles, All you need is love, elle qui fut magnifiée par Django Reinhardt dans Echoes of France, elle qui n’a jamais été aussi belle que dans le film Casablanca.

À l’occasion de ses 230 ans, la Ville de Marseille a voulu lui rendre hommage, en organisant un grand concert en extérieur, le 4 juin dernier, et une exposition qui s’est tenue au Musée d’Histoire jusqu’au 3 juillet. De la place François Mireur (Ier arrondissement) au Mémorial de la Marseillaise, elle s’efforce de garder vivant le souvenir de ce chant patriotique qui sublimera aujourd’hui notre fête nationale.
 

Le saviez-vous ?

L’une des plus célèbres reprises de La Marseillaise est celle de Serge Gainsbourg, qui choisit le titre Aux armes et cætera en 1979 pour une version reggae, qui déclenche très vite la polémique.

Le 4 janvier 1980, à Strasbourg, au cours d’un concert de l’artiste, des parachutistes prennent à partie la chanteur et distribuent des tracts auprès du public. Serge Gainsbourg s’empare du micro et clame « Je suis un insoumis » et explique avoir dû annuler le concert du fait de la défection de ses musiciens jamaïcains effrayés par l'ambiance ainsi que par une alerte à la bombe à l’hôtel où ils sont tous logés.

Criant « avoir redonné son sens initial» à La Marseillaise, il l'entonne a cappella.

Il remboursera par la suite tous les billets vendus pour ce concert annulé et Aux armes et cætera lui vaudra son premier disque d’or !