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César, un sculpteur marseillais : retour sur son itinéraire

 

César, c'est la trajectoire exceptionnelle d'un petit Marseillais qui a su se faire un prénom dans ce monde de l'art qui lui était totalement étranger au départ.

Pour le grand public, il reste avant tout le créateur de ces oeuvres en bronze que le gotha du cinéma français s'arrache chaque année, depuis 1976, lors de la "Cérémonie des César" (équivalent français des "Oscars") à laquelle il a donné son nom.
Mais son oeuvre va bien au-delà de ces statuettes dorées.

Il aurait eu 102 ans en 20232. Retour sur une destinée peu commune.

 

 

Itinéraire d'un enfant pas forcément gâté

Issu d'une famille modeste de la Belle de Mai, rien ne prédestinait, en effet, le petit César Baldaccini à accomplir un parcours artistique de renommée nationale et internationale.
S'il n'était pas un pur autodidacte – il a notamment fait les Beaux-Arts –  César revendiquait cette étiquette. Ayant grandi dans un quartier populaire, sa passion pour l'art et la sculpture a vu le jour de façon presque fortuite. Près de chez lui, se trouvait un marchand de pierres tombales dont le travail fascinait le petit Baldaccini. À tel point que, dès l'âge de six ans, il voulait devenir sculpteur.

À 14 ans, cette passion naissante va le conduire jusqu'aux cours du soir des Beaux-Arts de Marseille  il obtiendra (en 1937) trois prix – gravure, dessin et architecture – avant de rejoindre, en 1945, les Beaux-Arts de Paris.

Devant l'impossibilité pour lui de travailler la pierre, en raison de son coût, il se tourne vers d'autres matériaux et, en 1952, il se livre à ses premiers essais de soudure autour de la ferraille, à partir de matérieux de récupération peu coûteux : tubes, boulons, vis... Des matériaux qui correspondaient à un souci d'économie mais aussi à son approche artistique très "tactile". 
« L'oeuvre passe avant tout par les yeux et par les mains. Sans ces deux éléments, le cerveau ne fonctionne pas », se plaisait-il à répéter.

En 1954, en installant ses ateliers à l'usine de Villetaneuse (banlieue Nord de Paris), son travail sur la ferraille et la récupération va prendre toute son ampleur.
Au début des années 60, il va recentrer son travail sur les compressions qui deviendront l'une de ses marques de fabrique. Il utilise une presse hydraulique pour compresser notamment des véhicules usagés. «Tous les jours, des casseurs, jettent des oeuvres d'art.», ironisait-il malicieusement.
Défi lancé à la société de consommation, ce travail va le rapprocher du mouvement des "Nouveaux réalistes" auquel il est assimilé mais dont il se démarquera finalement.

En 1965, dans le cadre de sa série "Empreintes humaines", il présente son célèbre "Pouce" (moulage de son propre pouce) dont une version de six mètres de haut sera exposée aux Jeux olympiques de Séoul en 1988. Outre les fameux "César", c'est son oeuvre la plus médiatisée et la plus reproduite (dans différents matériaux : bronze, fer, fonte, or, cristal et même sucre). Les Marseillais la connaissent bien puisqu'un exemplaire se dresse, à Bonneveine, sur l'avenue de Hambourg (8e), face au Musée d'Art Contemporain (MAC). 
Des empreintes de seins (d'une danseuse du "Crazy Horse") et de poings complèteront notamment cette série de moulages anatomiques.

En 1970, le petit minot de la Belle de Mai boucle la boucle. Lui qui avait intégré les Beaux-Arts de Paris grâce à son statut de boursier, en devient professeur.

En 1976,  la première rétrospective de son oeuvre est organisée, de façon itinérante, à travers l'Europe.
La même année, les "César du cinéma" le font connaître définitivement auprès du grand public français.

Les dernières années de sa vie ont été très fastes. César multiplie les expositions : grande rétrospective au Jeu de Paume à Paris en 1997, rétrospectives à Malmö, Milan, São Paulo, Mexico.
César termine sa carrière par une série de portraits et d'autoportraits.

Sa renommée ne se démentira plus jusqu'à sa mort, survenue à Paris en 1998, à l'âge de 77 ans.

Les œuvres de César sont conservées par des musées du monde entier (Musée national d'art moderne de Paris, Tate Gallery à Londres, Museum of Modern Art de New York…).
 

 

Un attachement mutuel entre César et Marseille

En 2013, Marseille était capitale européenne de la Culture et a tenu à rendre hommage à César lors d'une rétrospective au Musée Cantini qui réunissait une trentaine d'oeuvres – parmi les plus représentatives de son style et de son évolution – léguées par César aux musées de Marseille. 
L'exposition était complétée par quelques pièces prêtées par le FRAC et des collectionneurs privés. Au total, une cinquantaine de sculptures, dessins et lithographies était présentée.

Auparavant, en 1993, une exposition s'était déjà tenue à la Vieille Charité marquant un attachement mutuel entre l'artiste et sa ville qui ne s'est jamais démenti.

 

Image vignette © SBJ / Adagp, Paris
Crédit photographique : Benjamin Soligny et Raphaël Chipault/Agence photographique de la Réunion des Musées Nationaux - Grand Palais des Champs-Elysées