Marseille !
Quelle histoire !
Aborder l’extrême complexité de
l’histoire de la plus vieille ville de
France laisse paradoxalement
l’entière libertéde«faire» très longou
très court, car, dans l’undes cas com-
medans l’autre, onnepeut prétendre
ni à tout dire, ni à tout expliquer.
L’Histoire de Marseille que publie
aujourd’huiJeanneLaffitte,enunpeu
plusde200 pages,estl’aboutissement
synthétisé d’une longue quête de la
ville et de son passé par un haut pra-
ticien de la pensée historique. Aller à
l’essentiel, comprendre et faire com-
prendre ce qui fait à travers les siècles
l’originalité et la grandeur de Mar-
seille,telestleparitenté.Ilimpliquait
des choix parmi les grandes étapes
heureuses oumalheureuses de cette
histoire. Point d’image d’Epinal en
toutcas,sinon,commentpourrait-on
y échapper ?, celle de la légende fon-
datrice,unelégende,sansdoute,mais
quiadusensetesquissesibiencequi
atoujoursétél’ouvertureportuairede
lavillesurlemonde.Enfait,lesvingt-
cinq premiers siècles, parcourus à
grands pas, mesurés au rythme des
aspérités de l’histoire avec leur cycle
perpétuel de crises et de rebondisse-
ments servent à progressivement bâ-
tir des certitudes ou des impressions
fortes quant à l’identité marseillaise.
Reste à les confirmer, les affiner à
l’aune du dernier siècle et demi où
achèvede sedessiner l’imagedeMar-
seille.Economie,démographie,urba-
nisme et maîtrise des espaces,
politique, bien sûr, sont les in-
grédients obligés de ce parcours ini-
tiatique réussi à travers Marseille et
son passé. Et la culture direz-vous ?
Elle est certes présente,mais à unde-
gré moindre. Faut-il le regretter ?
N’est-elle pas après tout ce qui reste
lorsque l’on a tout oublié ?
P. E.
Histoire de Marseille
par Emile Temime
Ed. Jeanne Laffitte
2006, 224 pages + 16 pages
de cartographie en couleur, 12 euros.
125
Marseille
Place au théâtre
Marseille est la plus vieille ville de
province à avoir obtenu le pri-
vilège de monter des opéras.
C’était en 1685. Depuis, l’amour
des Marseillais pour le lyrique ne
s’est jamais démenti et l’Opéra ac-
tuel de la place Reyer reste l’une
des meilleures scènes lyriques
françaises. C’est une partie de son
histoire, du temps où la salle était
appelée Grand Théâtre (entre
1787 et 1919), qu’évoque ici An-
dré Segond, spécialiste reconnu de
la question. Il ne s’agit pas en 130
pages de retracer dans le détail une
longue histoire qui reste à faire
malgré les nombreux ouvrages qui
lui ont été consacrés mais confor-
mément au titre et au format de la
collection («Tout savoir sur Mar-
seille»), d’informer le grand public
de façon claire et vivante du passé
glorieux et souvent mouvementé
d’un des fleurons culturels de la
ville. Plus qu’un simple temple du
lyrique, le Grand Théâtre apparaît
comme la grande salle de prestige
de Marseille, recevant non seule-
ment les plus grands artistes du
chant (Nourrit, La Patti, Melba,
Victor Maurel et tant d’autres…),
mais aussi les monstres sacrés de
la tragédie (de Mlle Mars à Sarah
Bernhardt) et les plus grands vir-
tuoses. Entre triomphes et vacar-
mes, c’est aussi l’image d’un public
à la fois connaisseur, exigeant et
«bouillant» qui se dessine à travers
de multiples anecdotes romanes-
ques, savoureuses mais «vraies»
qui confirment la réputation sulfu-
reuse qui reste encore attachée au
dilettanti marseillais. L’ouvrage est
abondamment illustré.
P. E.
Le Grand Théâtre de Marseille
Par André Segond
Ed. Autres Temps
2006, 130 pages dont un cahier
couleur, 12 euros.
Au bonheur de tous
Leur savoir-faire allié au savoir
vendre, les commerces marseillais
de tradition participent à l’histoire
de Marseille et contribuent à son
image. La durée d’une entreprise,
son enracinement ancien dans un
quartier, dans une rue, sa façon
même à travers son enseigne, sa
vitrine, son décor intérieur, ses
rayonnages de resituer ses racines,
la pérennité de ses produits, ou
plus simplement le maintien
d’une activité par ailleurs disparue
sont autant de signes qui donnent
immédiatement à rêver, à vivre la
double dimension d’hier et
d’aujourd’hui de l’identité mar-
seillaise. Les noms «dynastiques»
de certains de ces commerces, re-
montant parfois à plus de deux
siècles, chantent à la mémoire des
vieux Marseillais, tout en faisant
partie aujourd’hui encore du quo-
tidien des plus jeunes avec ce
prestige, cette haute réputation
que donne, comme une garantie
d’excellence, le fait d’avoir traversé
les décennies et de maintenir une
tradition ancrée au cœur de la vil-
le et des Marseillais. Partant de là,
l’ouvrage que propose aujourd’hui
les Editions Crès met en vedette
une bonne vingtaine de ces com-
merces «phares» dont les noms
seuls sont devenus mythiques :
Blaize, Carbonel, Dromel, Trabuc,
Gatimel, Empereur, le Four des
navettes, la Palette d’or, Reboul,
Marrou… –Il faudrait tous les ci-
ter ! Comme toujours, la présen-
tation de l’ouvrage est attractive et
soignée ; l’iconographie abondan-
te, évocatrice et chatoyante est si-
gnée Christian Crès, c’est tout di-
re !
P. E.
Les commerces marseillais
de tradition
Par Xavier Giocanti, Gurvan Lemée
et Christian Crès
Ed. Crès,
2006, 144 pages, 35 euros.
Un classique
Les Editions Aubéron ont eu, ces
derniers temps, l’excellente idée de
réimprimer –et avec quel soin– le
fameux ouvrage d’André Alaunzen
sur les peintres de paysages pro-
vençaux.
«La Provence, écrivait-il,
mérite le regard émerveillé des pein-
tres qui nous la font redécouvrir.Elle
leur donne la liberté de s’exprimer en
dehors de toutes les écoles. Elle leur
offre des paysages, dont certains sont
devenus mythiques»
. Et ce livre
somptueux offre au lecteur-
spectateur les délices d’un voyage
intelligent à travers une Provence
de lumière.
M. S.
La merveilleuse Provence
des peintres
Par André Alauzen di Genova
Ed. Naef/Aubéron
300 pages, relié 27,5x32,5 cm.
45 euros