sous une tourmente de neige et un ciel exécrable
qui disparaissent comme par enchantement à la
sortie de la Nerthe, en vue de Marseille.
Dès lors, la dernière partie du trajet se fait entre
deux haies de spectateurs, échelonnés sur toute
la ligne, saluant de leurs cris «
cette course de feu»
.
A 16h35, le train entre en gare au milieu des fan-
fares et des vivats. Les 172 km aller-retour ont
été faits en 5 heures, deux fois plus vite qu’avec
la diligence. Emporté par son élan, le journaliste
de la
Gazette duMidi
s’exclame : le gouvernement
ne doit pas arrêter à Avignon
«la plus belle ligne
de France, nous allions dire du monde»
. Chacun
félicite le héros de la journée, Talabot, omnipré-
sent pendant le voyage, tantôt général, tantôt
simple soldat sur sa locomotive, exposé au vent,
à la pluie, à la neige, le visage noirci par la fumée
de charbon.
En attendant le PLM
Tout le monde, pourtant, n’a pas vécu cette inau-
guration avec le même enthousiasme.
Le Mémo-
rial d’Aix
déplore que l’ancienne capitale de la
Provence soit oubliée par le chemin de fer.
«Nous ne pouvons, dans la solitude et l’isolement
de notre ville, que jeter un regard de tristesse sur ce
qui se passe à quelques lieues de nous. Cette voie de
fer qui relie Avignon àMarseille, qui est la continua-
tion de la route du nord, du centre, de l’est de la
France aboutissant à cette riche cité ; cette voie de
fer que l’on inaugure aujourd’hui est pour nous la
cause de la dépossession d’un transit important de
voitures et de voyageurs, d’un routage qui faisait
l’animation et la richesse de notre ville ; aussi pour-
quoi mêler notre allégresse à celle de nos voisins !
Ils fêtent, eux, leur vie, leur puissance, leur riche
activité ; nous fêterions nous, notre mort, si nous
nous associons aux cris de joie dont le bruit arrivera
jusqu’à nous».
Les Aixois avaient fait reconnaître depuis 1845
16
Le grand
atelier
du Val
de la Nerthe
©BMVR
©BMVR
1848